mercredi 26 mai 2021

Présidentielle en Iran : les ultraconservateurs presque seuls en lice

Il avait obtenu 38% des voix en 2017. Quatre ans plus tard, l'ultraconservateur Ebrahim Raïssi est le grand favori de l'élection présidentielle en Iran, organisée le 18 juin prochain. Ce scrutin visant à désigner le successeur du président Hassan Rohani, figure du courant dit modéré, devrait opposer sept candidats, dont cinq ultraconservateurs, selon la liste officielle publiée mardi. 


Outre Ebrahim Raïssi, quatre candidats ultraconservateurs ont été retenus : Saïd Jalili, ancien secrétaire général du Conseil suprême de la sécurité nationale, le général Mohsen Rézaï, ancien commandant en chef des Gardiens de la Révolution, et les députés Amirhossein Ghazizadeh-Hachémi et Aliréza Zakani. Face à ce bloc figurent deux réformateurs, sans véritable envergure nationale : le gouverneur de la Banque centrale, Abdolnasser Hemmati, et un ancien vice-président, Mohsen Mehralizadeh.

Sans surprise, le Conseil des gardiens de la Constitution, organe non élu chargé de la validation des candidatures, a rejeté celle de l'ancien président Mahmoud Ahmadinejad (populiste), déjà retoquée en 2017. Mais contre toute attente, les Gardiens ont barré la route au conservateur Ali Larijani, ancien président du Parlement et actuellement conseiller du guide suprême Ali Khamenei, ainsi qu'au vice-président Eshaq Jahanguiri (réformateur). Mahmoud Ahmadinejad, en qui se reconnaissent de nombreux Iraniens en ces temps de vaches maigres, avait averti le 12 mai qu'il boycotterait le scrutin s'il était disqualifié. Il n'avait pas encore réagi à l'annonce de son élimination en début de soirée. 

Ali Larijani et Eshaq Jahanguiri ont dit accepter le verdict du Conseil des gardiens. Le vice-président sortant a déploré "que la disqualification de nombreuses personnes de valeur était une menace sérieuse pour la participation" et ne permettait pas une "concurrence honnête". "Je n'ai jamais trouvé les décisions du Conseil des gardiens aussi indéfendables qu'aujourd'hui, qu'il s'agisse des approbations ou des disqualifications", a écrit sur Twitter l'un des membres de ce même conseil, l'ayatollah Sadeq Amoli Larijani. Ce dignitaire chiite est certes le propre frère de Ali Larijani, mais c'est aussi une huile au sein du système iranien. Ancien chef du pouvoir judiciaire, il préside une haute instance d'arbitrage politique. 

Une abstention importante ?

La campagne électorale va s'ouvrir sur fond de négociations à Vienne pour tenter de sauver la grande réalisation de Hassan Rohani : l'accord international sur le nucléaire iranien, dont la dénonciation en 2018 par les Etats-Unis sous la présidence de Donald Trump a plongé le pays dans une violente récession avec le retour des sanctions américaines que ce pacte avait permis de lever. 

Remportées haut la main par les conservateurs et les ultras, les législatives de 2020 ont été marquées par une abstention record (57%) sur fond d'invalidation massive de candidats modérés et réformateurs, et de désenchantement face à l'échec de la politique d'ouverture de Hassan Rohani.  

Après la répression violente des vagues de contestation de l'hiver 2017-2018 et de novembre 2019, le mécontentement de la population est toujours palpable. La décision du Conseil des gardiens "transforme l'élection en une nomination", estime Majid, ingénieur interrogé par l'AFP, "avant c'était déguisé, maintenant cela ne l'est même plus". Pour Farnouche, monitrice de gymnastique, "la question de savoir qui sera le prochain président ne compte pas vraiment, parce que qui que ce soit, rien ne changera". 

"Une participation minimale n'est dans l'intérêt de personne", a déclaré mardi le porte-parole du gouvernement, Ali Rabii, appelant "toutes les instances jouant un rôle dans l'élection" à permettre "un regain d'espérance et d'enthousiasme" avant le scrutin.  

Le président iranien Hassan Rohani a quant à lui affirmé avoir écrit au guide suprême Ali Khamenei pour lui demander d'intervenir en vue d'assurer une plus grande "concurrence" à la présidentielle de juin. "Le coeur des élections, c'est la concurrence. Si vous enlevez cela, vous avez un cadavre", a-t-il déclaré ce mercredi. L'ayatollah Khamenei plaide depuis des semaines pour une participation "massive" le 18 juin. En 2005, son intervention avait conduit le Conseil des gardiens de la Constitution à finalement autoriser deux candidats qu'il avait d'abord rejetés. Même Ebrahim Raïssi a écrit sur Twitter, après la publication de la liste officielle, qu'il avait entamé "des consultations afin que l'élection soit plus concurrentielle et marquée par une forte participation". 

Source : L'Express

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