Quelques heures après que l’administration Biden s’est déclarée favorable à la levée de la propriété intellectuelle sur les vaccins, Emmanuel Macron a fait de même jeudi lors de l’inauguration du premier grand vaccinodrome parisien. Une levée temporaire est notamment réclamée par l’Inde et l’Afrique du Sud pour pouvoir accélérer la production, mais certains pays y sont farouchement opposés.
L’idée est de pouvoir accélérer la production mondiale afin de lutter contre la pandémie de Covid-19 qui continue de faire des ravages. Au moins 3,2 millions de personnes sont mortes dans le monde depuis que le bureau de l’Organisation mondiale de la santé (OMC) en Chine a fait état de l’apparition de la maladie à la fin de décembre 2019, selon un bilan établi par l’Agence France-Presse (AFP) mercredi.
Emmanuel Macron « tout à fait favorable » à la levée des brevets sur les vaccins, l’UE « prête à discuter »
Le président de la République s’est dit « tout à fait favorable à ce que la propriété intellectuelle soit levée » sur les vaccins. « Oui, nous devons évidemment faire de ce vaccin un bien public mondial », a ajouté le chef de l’Etat, en inaugurant jeudi le premier grand vaccinodrome à Paris, tout en soulignant que la priorité à court terme était « le don de doses » et « de produire en partenariat avec les pays les plus pauvres ». Le 23 avril, il s’était dit opposé à la levée immédiate de la propriété intellectuelle, expliquant alors que le sujet n’était pas celui-là mais celui du transfert de technologie.
Peu après, la Russie a exprimé une position similaire. « Bien sûr, la Russie soutiendrait une telle approche », a affirmé Vladimir Poutine lors d’une réunion sur la pandémie retransmise à la télévision, demandant au gouvernement russe d’étudier cette éventualité.
L’Union européenne (UE) est « prête à discuter » de la proposition américaine, afin d’accélérer la production et la distribution des vaccins, a déclaré peu avant la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Jusqu’à présent, l’UE ne s’y disait pas favorable, arguant que cette solution prendrait du temps, faute de moyens de production immédiatement mobilisables. La présidente de la Commission européenne a rappelé que l’UE était pour l’heure « le principal exportateur de vaccins du monde » et a appelé les autres pays producteurs à lever leurs restrictions pour exporter leurs doses.
L’Allemagne et la Suisse émettent des réserves
En revanche, le gouvernement d’Angela Merkel a exprimé jeudi de fortes réserves à l’égard de la proposition soutenue par les Etats-Unis, estimant au contraire qu’ils devaient continuer à être « protégés ». « La proposition américaine (...) a des implications pour l’ensemble de la production de vaccins », a mis en garde une porte-parole du gouvernement allemand dans un communiqué, expliquant que « la protection de la propriété intellectuelle est la source de l’innovation et doit continuer à l’avenir à le rester ». « Ce qui limite la fabrication des vaccins ce sont les capacités de production et les exigences élevées de qualité, pas les brevets », a encore souligné la porte-parole.
La Suisse, où l’industrie pharmaceutique a un grand poids économiquee, a affirmé jeudi qu’une suspension des brevets ne ferait rien pour « un accès équitable, abordable et rapide aux vaccins, médicaments et produits de diagnostic contre le Covid-19 ».
La directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce, Ngozi Okonjo-Iweala, a « accueilli chaleureusement » l’annonce des Etats-Unis et encouragé l’Inde et l’Afrique du Sud, à l’origine de la proposition, à présenter rapidement un texte révisé. « C’est seulement en nous asseyant autour de la table que nous trouverons le moyen pragmatique et acceptable pour tous les membres d’avancer », a-t-elle écrit dans un communiqué lu par le porte-parole de l’OMC, Keith Rockwell.
Les brevets ne sont « pas le facteur limitant » la production de vaccins
Le laboratoire allemand BioNTech a pour sa part estimé, jeudi, que la protection des brevets sur les vaccins contre le Covid-19 n’était pas le facteur limitant la production et l’approvisionnement de son vaccin développé avec l’américain Pfizer. Pour BioNTech, une telle mesure n’aurait pas d’effet « à court et moyen terme ». « Les experts ont déjà souligné que la mise en place et la validation de nouveaux sites de production prennent en général un an », argumente-t-il.
Par ailleurs, la production de vaccin à ARN messager, comme celui mis au point par BioNTech et Pfizer, « est un processus complexe développé sur plus d’une décennie. Toutes les étapes doivent être définies et exécutées de façon précise », par un « personnel expérimenté », a-t-il encore expliqué. Si toutes les exigences ne sont pas remplies, la qualité et l’efficacité du vaccin pourraient en être affectées.
L’Allemagne veut vacciner tous les 12-18 ans d’ici à fin août
La lutte contre la pandémie s’intensifie sur le front vaccinal. L’Allemagne sera en capacité de proposer la vaccination contre le Covid-19 à tous les adolescents d’ici à la fin du mois d’août, sous réserve du feu vert de l’Agence européenne des médicaments (AME) pour la tranche d’âge concernée, a annoncé jeudi 6 mai le ministre de la santé allemand, Jens Spahn.
Le gouvernement et les Länder se sont mis d’accord pour « qu’une offre de vaccin puisse être faite à tous les 12-18 ans », a ainsi déclaré M. Spahn, qui table sur une autorisation du vaccin de Pfizer-BioNTech par l’AME pour les 12-15 ans au mois de juin. Le ministre a également annoncé que son pays allait autoriser l’administration du vaccin développé par AstraZeneca à l’ensemble des adultes allemands, quel que soit leur âge, revenant sur une précédente mesure qui limitait l’usage du vaccin aux plus de 60 ans.
Les difficultés de CureVac pourraient contrarier la vaccination dans l’UE
L’allemand CureVac, qui doit jouer un rôle important dans les campagnes européennes de vaccination, évoque des difficultés d’approvisionnement, accusant les Etats-Unis de bloquer l’exportation de certains composants nécessaires à sa fabrication. Interrogé au sujet du rythme de production de son vaccin pour cet été, Franz-Werner Haas, patron de CureVac, s’est abstenu de répondre, se contentant de dire qu’en la matière son groupe vivait « au jour le jour » et peinait à constituer « un stock important ».
Certes, il n’est pas encore approuvé : ses essais doivent aboutir dans les prochaines semaines et, dans la foulée, les autorités sanitaires européennes se prononceront à son sujet. Mais l’UE a d’ores et déjà fait un gros pari dessus. Elle en a commandé plus de 400 millions de doses, la principale commande engrangée par CureVac dans le monde.
Jeux olympiques : des vaccins de Pfizer-BioNTech pour les athlètes
Alors que l’accueil des Jeux olympiques (JO) de Tokyo continue d’inquiéter la population japonaise, les laboratoires Pfizer et BioNTech ont promis, jeudi, de donner des vaccins aux participants, inégalement protégés pour l’heure selon les pays. Les deux entreprises « se coordonneront avec les comités olympiques à travers le globe » pour organiser cette distribution, déclarent-elles dans un communiqué. Le Comité international olympique (CIO) a toujours exclu de rendre la vaccination obligatoire pour les JO (du 23 juillet au 8 août), et même de réclamer une priorisation des sportifs, difficilement justifiable sur le plan éthique, mais encourage depuis des mois un maximum de participants à se faire vacciner. Les JO doivent accueillir environ 11 000 sportifs.
Source : Le Monde
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